Recherche
Au titre de leurs missions officielles, les parcs zoologiques s’impliquent dans la recherche scientifique en partenariat avec des organismes de recherche reconnus afin de mieux connaître les espèces. « Mieux connaître, mieux comprendre, mieux protéger »
Dans un contexte où l’effondrement de la biodiversité se perçoit à échelle humaine, avec pour triste record chez les oiseaux, les vautours où une diminution de plus de 90% des populations est enregistrée ces dernières années (McClure et al. 2018), les parcs zoologiques constituent un rempart essentiel à une extinction massive proche. Outre les services éducatifs et un maintien de populations captives de forte diversité génétique, les parcs zoologiques offrent un accès concentré et inégalé de connaissances biologiques sur la plupart des taxons.
En effet, avec une grande diversité d’espèces hébergées, les parcs zoologiques sont des lieux privilégiés pour en apprendre plus sur la biologie animale et ainsi améliorer la compréhension des espèces et leurs besoins.
Le champ de cette mission de recherche des parcs zoologiques est large puisqu’il intègre aussi bien de la recherche au niveau des individus, que des espèces ou des habitats, et de très nombreux domaines sont concernés : physiologie, nutrition, reproduction, éthologie, génétique, soins vétérinaires, démographie, écologie sensorielle, histologie, anatomie, taxonomie etc
Les parcs zoologiques accueillent chaque année de nombreux étudiants et chercheurs. Les travaux sont ainsi réalisés en collaboration avec des universités ou des centres de recherche nationaux et internationaux (CNRS, INRA, Institut Pasteur, Université de Lund, etc).
Les individus de parcs zoologiques sont nécessaires à la recherche scientifique. En effet, ces collaborations essentielles permettent aux biologistes :
d’avoir accès à des individus appartenant à des espèces menacées difficilement accessibles dans le milieu naturel. En parcs zoologiques, il est possible d’étudier plusieurs spécimens d’une même espèce rare et de nombreuses espèces différentes sont présentes.
d’étudier des individus habitués à la présence de l’homme. Ces individus permettent aux scientifiques de réaliser des études inenvisageables ou biaisées par un stress important à l’état naturel. C’est notamment le cas pour les expérimentations de conditionnements positifs permettant d’acquérir des connaissances indispensables sur les capacités cognitives et sensorielles des espèces.
de pouvoir répéter les manipulations et les prises de données dans un contexte stable. Le nombre de répétitions permet d’augmenter la fiabilité des résultats.
de récupérer facilement le matériel de mesure dont les animaux sont équipés (par exemple, il est possible d’équiper des rapaces en vol libre d’électrocardiogrammes couplés à une balise GPS qui sont retirés après rappel des fauconniers).
de tester facilement la fiabilité des nouvelles technologies de suivi des animaux, en cours de développement, pour une meilleure protection de ceux-ci dans la nature
de créer des banques d’ADN, de tissus, de semences à partir d’échantillons faciles à recueillir
Les recherches ainsi réalisées au sein des parcs zoologiques participent à l’acquisition de connaissances sur les espèces animales menacées. Ces nouvelles données permettent de mieux connaître et donc de mieux protéger les espèces dans la nature puisqu’elles ont des implications directes sur les mesures de conservation in situ.
A titre d’exemple, face à un environnement modifié/pollué par les activités humaines, il est essentiel de comprendre les capacités sensorielles des organismes afin de savoir comment ils peuvent s’adapter ou non à ces nouveaux environnements (Dominoni et al. 2020). L’étude des capacités visuelles des rapaces au sein des parcs zoologiques est un enjeu majeur de la compréhension du fort taux de collision de ce taxon au niveau des parcs éoliens (Martin et al. 2012, Potier et al. 2018a,b).
La compréhension des capacités olfactives des espèces est également essentielle dans la réussite des programmes de protection et réintroduction (Campbell-Palmer and Rosell 2011). La collaboration entre les parcs zoologiques et le CNRS/CEFE de Montpellier a permis de mettre en évidences que ces capacités olfactives sont essentielles chez les rapaces, tant pour la recherche alimentaire que pour la reproduction (Potier et al. 2018c ; Potier 2019 ; Potier et al. 2019).
Les parcs zoologiques français sont des pionniers dans ce domaine, avec de nombreuses publications scientifiques et une participation financière et matérielle à deux thèses de doctorat (cf ci-dessous) ces 10 dernières années. Ces travaux ex-situ auront et ont des retombées importantes sur la conservation des espèces in-situ. L’appréhension des capacités sensorielles est en effet essentielle pour améliorer la reproduction des espèces menacées, la réduction des collisions avec les dispositifs anthropiques (éoliennes, lignes électriques, vitres) ou encore l’évitement de poisons mortelles (comme le diclofénac pour les vautours).
Toujours en coopération avec les parcs zoologiques, un cocktail anesthésique a été développé pour les lycaons (Lycaon pictus, EN). En effet, dans la nature les lycaons sont amenés à être anesthésiés pour poser des colliers émetteurs pour le suivi de l’espèce, ou pour soigner leurs blessures car ils ont été percutés par une voiture ou qu’ils sont pris dans un piège à collets destinés au petit gibier local. Or, il est indispensable d’éviter les hyperthermies malgré les températures élevées, et de permettre un réveil et un retour des capacités très rapides pour la survie de l’animal et le retour au sein de sa meute. Dans ce but, un cocktail anesthésique a été développé en zoo par les vétérinaires spécialisés.
Retrouvez tous les numéros du journal JZAR (Journal of Zoo and Aquarium Research) dédié à la recherche de :
l’EAZA – Association Européenne des Zoos et Aquariums
Les références utilisées
Les références utilisées
Campbell-Palmer R, Rosell F. 2011. The importance of chemical communication studies to mammalian conservation biology: a review. Biological Conservation 144: 1919-1930.
Dominoni, D.M.; Halfwerk, W.; Baird, E.; Buxton, R.T.; Fernández-Juricic, E.; Fristrup, K.M.; McKenna, M.F.; Mennitt, D.J.; Perkin, E.K.; Seymoure, B.M.; Stoner, D.C.; Tennessen, J.B.; Toth, C.A.; Tyrrell, L.P.; Wilson, A.; Francis, C.D.; Carter, N.; Barber, J.R. Why conservation biology can benefit from sensory ecology. Nature Ecology and Evolution 2020, 1-10.
Martin, G.R.; Portugal, S.J.; Murn, C.P. Visual fields, foraging and collision vulnerability in Gyps vultures. Ibis 2012, 154, 626-631.
McClure, C.J.W.; Westrip, J.R.S.; Johnson, J.A.; Schulwitz, S.E.; Virani, M.Z.; Davies, R.; Symes, A.; Wheatley, H.; Thorstrom, R.; Amar, A. State of the world’s raptors: Distributions, threats, and conservation recommendations. Biological Conservation 2018, 227, 390-402.
Potier, S.; Mitkus, M.; Kelber, A. High resolution of colour vision, but low contrast sensitivity in a diurnal raptor. Proceedings of the Royal Society B: Biological Sciences 2018a, 285, 20181036.
Potier, S.; Duriez, O.; Cunningham, G.B.; Bonhomme, V.; O’Rourke, C.; Fernández-Juricic, E.; Bonadonna, F. Visual field shape and foraging ecology in diurnal raptors. Journal of Experimental Biology 2018b, 221, jeb177295.
Potier S, Besnard MM, Schikorski D, Buatois B, Duriez O, Gabirot M, Leclaire S, Bonadonna F. 2018c. Preen oil chemical composition encodes individuality, seasonal variation and kinship in black kites Milvus migrans. Journal of Avian Biology 49: e01728.
Potier, S. Olfaction in raptors. Zoological Journal of the Linnean Society 2019, 189, 713-721.
Potier S, Duriez O, Célérier A, Liegeois J-L, Bonadonna F. 2019. Sight or smell: which senses do scavenging raptors use to find food? Animal cognition 22: 49-59.
Thèses en collaboration avec l’AFdPZ sur les capacités sensorielles des oiseaux :
2013-2016 : Simon Potier – Ecologie sensorielle des rapaces : Vision et Olfaction. Université de Montpellier – CEFE/CNRS. Sous la direction de Francesco Bonadonna et Olivier Duriez
2020-2023 : Constance Blary – Perception visuelle des éoliennes par les oiseaux. Université de Montpellier – CEFE/CNRS. Sous la direction de Francesco Bonadonna, Olivier Duriez et Simon Potier